Vainqueur de la dernière Route du Rhum en IMOCA sur le voilier « SMA », Paul Meilhat participe à cette 12ème édition. Mais pas avec la même ambition de victoire. Le lauréat 2018 part en effet sur un bateau construit et mis à l’eau il y a quelques semaines seulement. Le « Biotherm » est un foiler neuf, et tout simplement le « sistership », la copie conforme de l’actuel « LinkedOut » avec lequel le Dunkerquois Thomas Ruyant dispute lui sa dernière course. Avec le même bateau, les deux skippers auront donc des objectifs totalement opposés.
A Saint-Malo, Jean-Marc Devred
A 40 ans seulement, Paul Meilhat dispose d’un palmarès impressionnant. Transat AG2R 2014; Rolex Fastnet Race 2017 et 2021; Bermudes 1000 Race et donc, Route du Rhum 2018, le Francilien a également terminé deux fois 2ème de la Transat Jacques Vabre et réalisé le record SNSM (Tour de la Bretagne) en 2015. Pas mal pour un non Breton puisque Meilhat est Francilien, natif de La Garenne-Colombes.
La voile olympique avant la course au Large
Avec son père, Paul Meilhat a commencé très tôt à sillonner les plans d’eau de la région parisienne et de la Bretagne. ll débute en dériveur et pratique la voile olympique. Avant de passer à la course au large en 2008.
Pourtant, malgré son succès en Guadeloupe lors de la dernière édition, il a mis du temps à retrouver un sponsor. Avec comme objectif final le Vendée Globe 2024-2025. C’est fait depuis deux ans où Meilhat s’est associé au producteur de cosmétiques Biotherm. Depuis la Route du Rhum 2018, il n’a plus jamais navigué en solitaire !
Une fois ce partenariat conclu, le chantier a tout de suite été lancé pour la construction d’un foiler neuf. Objetif: le Vendée Globe 2024-2025 avec la Route du Rhum comme première étape. Pour gagner du temps, Paul Meilhat et Biotherm choisissent de copier un modèle déjà existant et performant: le monocoque de Thomas Ruyant « Linked Out accéléré par Advens ».
La construction dans le même chantier
Commande est passée en Italie avec le chantier naval Persico Marine à Bergame, là où a été construit le voilier du marin dunkerquois. Même plan Verdier, mêmes moules pour la coque. Le bateau va être construit en un temps record de huit mois avant d’être mis à l’eau le 31 août.
« J’ai plutôt un bon niveau de confiance au niveau de la fiabilité », affirme ainsi Paul Meilhat. « Biotherm est un sistership de « Linkedout » sur beaucoup de points. On part sur une base connue en termes de structure. On a déjà tiré fort sur le bateau. Il est tellement récent qu’à chaque navigation, on découvre des petites choses qui ne vont pas, ce qui est normal car les IMOCA sont des machines très complexes. Cela va forcément me perturber sur la course. J’espère rencontrer des problèmes mineurs qui ne m’empêcheront pas de traverser sereinement. Je dois avoir une gestion de mon bateau plus raisonnable. L’attaque, ce sera pour plus tard.«
Le skipper francilien a effectivement eu à peine le temps de naviguer deux semaines sur son bateau, avant de le convoyer vers Saint-Malo, où il a été baptisé par la responsable du développement durable chez l’Oréal Luxe, Marie Pia Schlumberger.
Une configuration légèrement différente
Si « Biotherm » est bien le sistership du foiler de Ruyant, il a quand même été configuré à la main de Paul Meilhat. Lors de la visite du bateau, nous avons ainsi constaté que le cockpit et la cabine de vie semblaient plus spacieux et plus confortables que sur « LinkedOut ». » Avec Paul, nous avons la même philosophie. Celle de ne pas encombrer inutilement le voilier avec du matériel pas indispensable« , explique ainsi le responsable technique du team.
Ce qui surprend, c’est la cabine totalement noire qui donne l’impression d’être toujours dans la nuit. Mais l’aménagement intérieur n’était pas encore totalement terminé. Les couchettes seront ainsi installées, notamment en prévision de la première course en équipage, The Ocean Race, qui suivra la Route du Rhum.
Biotherm, un bateau laboratoire
Et il y aura une différence de taille. « Biotherm » va embarquer un mini laboratoire de recherches de … 28 kilos. « Tout ce qu’il ne faut pas pour faire la course », explique dans un sourire Paul Meilhat. « Mais nous trouverons des solutions pour compenser ce surpoids, à commencer par la motivation. »
Le partenariat avec Biotherm comporte en effet un volet écologique cher à Paul Meilhat. C’est ce que Grégory Benoît, le directeur général international de l’entreprise, a rappelé le jour du baptême. « C’est la fin d’un épisode, des 50 000 heures de travail pour construire un bateau en un temps record. C’est aussi le début d’une grande aventure qui va durer jusqu’en 2025 et qui va galvaniser tout le monde. On est tous ravis ! Il faut rappeler que tout ceci est né d’une rencontre avec Paul il y a trois ans, aux côtés de Surfrider Foundation Europe. Au-delà du sport, ce partenariat a du sens car le bateau sera équipé d’un mini laboratoire de recherche qui permettra de récolter des données sur la santé des océans course après course ».
Ambition limitée pour Paul Meilhat sur cette Route du Rhum
De ce fait, Paul Meilhat explique qu’il ne jouera pas la gagne sur cette Route du Rhum. Ce sera en effet sa première course. Ses ambitions sont limitées, vu la jeunesse du bateau qu’il va découvrir en mode compétition. C’est ce qu’il nous a confié à Saint-Malo.
« Il ne faut pas se tromper d’objectif , explique le marin de 40 ans. Je suis au début de l’histoire avec le bateau. J’ai tout à apprendre, tout à découvrir. Arriver de l’autre côté en ayant le sentiment que Biotherm a un gros potentiel pour la suite, serait pour moi le gage d’une course réussie. Alors il faudra probablement que je me calme. Que je reste raisonnable, même si chaque compétition signifie pour moi un engagement total ».
Ce ne sera pas forcément le cas pour la course suivante, The Ocean Race, qui partira d’Alicante en Espagne le 15 janvier 2023. Il s’agit du Tour de Monde en équipage et par étapes au palmarès prestigieux. Et là, Paul Meilhat compte bien jouer les premiers rôles avec un équipage performant et un IMOCA fiabilisé.
Sur cette Route du Rhum 2022, on suivra donc avec curiosité les parcours de Paul Meilhat et Thomas Ruyant. Deux concurrents qui disposent du même bateau, mais pas au même stade de préparation.