RUGBY : LES SPRINGBOKS 2023 ENTRENT DANS L’HISTOIRE !

Finale de la Coupe du Monde 2023 Afrique du Sud/Nouvelle-Zélande
Les Springboks brandissent leur 4ème Coupe du Monde (Photo Julian Finney - World Rugby/World Rugby via Getty Images)

L’Afrique du Sud bat la Nouvelle-Zélande à l’arraché (12-11) en finale de la Coupe du Monde de rugby 2023. Les Springboks remportent ainsi le trophée William Webb-Ellis pour la seconde fois consécutive, et la 4ème au total. Une performance historique après un parcours semé d’embûches. Cette finale a été haletante, à défaut d’être brillante.

A Saint-Denis, Jean-Marc Devred

Ça y est ! Commencée le 8 septembre par un énorme France-All Blacks dans la chaleur, la Coupe du Monde de rugby 2023 a pris fin 7 semaines plus tard par une finale Nouvelle-Zélande/Afrique du Sud sous la pluie. Un changement de saison dû à la longueur de la compétition.

La passion aussi était différente. L’engouement en France est bien retombé après l’élimination cruelle des Bleus par les Springboks en 1/4 de finale. Cette finale pourtant prestigieuse n’intéressait plus que les Antipodes, et les vrais amateurs de rugby. Un match France-Irlande aurait certainement provoqué une autre effervescence.

Malgré cela, le Stade de France était quand même plein pour cette énième confrontation entre les deux meilleures Nations rugbystiques de l’Histoire. Avec un vrai challenge: qui sera le premier à gagner 4 fois le Trophée Web Ellis ?

Avant cela, Mika était chargé de lancer la soirée en beauté. Le chanteur libano-américain animait ainsi la cérémonie de clôture, avec un mini-concert de 5 minutes, en compagnie des 700 enfants qui ont chanté les hymnes nationaux durant la compétition. Rapide et efficace. Beaucoup mieux que Jean Dujardin pour la cérémonie d’ouverture…

Une ambiance verte

Il y avait quand même une belle ambiance, avec une majorité pour les Springboks. Le vert dominait nettement le noir dans les tribunes du Stade de France. A mes côtés en tribune de presse, un confrère néerlandais se réjouissait de cette atmosphère. M’étonnant de l’intérêt d’un Batave pour le rugby, Antonius (c’est son prénom, comme -Antoine- Dupont) me montre les tribunes parées de vert et les joueurs qui s’entraînent: « les descendants de huguenots hollandais, c’est presque la moitié de l’équipe. »Exact, car les Afrikaners sont toujours majoritaires chez les Boks.

Mais je lui rappelle aussi qu’il y a un clan français bien présents, avec des descendants de protestants qui ont fuit la France au siège de La Rochelle (Malherbe, Le Roux, Du Toit, Fourie...). Plus les Anglais et maintenant des joueurs noirs et métis. Les Springboks de Siya Kolissi, le capitaine, représentent bien la Nation Arc-en-Ciel chère à Nelson Mandela.

Rugby: Afrique du Sud/Nouvelle-Zélande
L’avant sud-africain Pieter-Steph Du Toit a été le meilleur joueur de cette finale(Photo David Ramos – World Rugby/World Rugby via Getty Images)

Durant la rencontre, Antonius va lui aussi passer par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. Clairement supporter de l’Afrique du Sud, il vit une première période tranquille avec Handré Pollard qui a 100% de réussite dans ses coups de pied. Et surtout le carton jaune, transformé en rouge, infligé par M.Barnes et la VAR au capitaine néo-zélandais Sam Cane pour « jeu déloyal ». Les All Blacks vont devoir jouer à 14 jusqu’à la fin du match.

Au repos, l’Afrique du Sud mène 12-6 et le match semble déjà plié vu l’infériorité numérique des Néo-Zélandais.

La révolte des All Blacks en 2ème mi-temps

Mais voilà. Un All Black n’est jamais battu d’avance. Même quand Kolisi oublie peu après la reprise de servir son équipier Kriel pour un essai assuré. Au grand dépit de Antonius, dont le visage va se crisper ensuite. Surtout quand Beauden Barrett marque ce qui sera le seul essai de cette finale à la 58è minute. Il rate cependant la transformation mais la Nouvelle-Zélande revient quand même à un point 11-12. Avec plus de 20 minutes à jouer.
Antonius va même changer de couleur lorsque Kolisi écope à son tour d’un carton jaune, susceptible de se transformer en rouge. Ce ne sera pas le cas. Mais les Springboks également réduits à 14 vont subir les assauts noirs jusqu’à la fin. « J’ai un pacemaker. Mon coeur palpite », lâche Antonius alors qu’il reste trois à jouer. Mais la dernière mêlée est sud-africaine. Le demi de mêlée récupère et gère bien les dernières secondes avant de dégager en touche.

Vidéo. Le résumé de la finale Afrique du Sud/Nouvelle-Zélande (images World Rugby)

Dominée tout au long de la seconde période, l’Afrique du Sud remporte quand même sa 4ème Coupe du Monde, et la 2ème consécutivement. Là encore, le score est étriqué (12-11). Les Springboks n’ont pas marqué d’essai et s’imposent grâce aux 4 pénalités de Pollard. C’est aussi la 3ème victoire consécutive avec le plus mince des avantages après la France en 1/4 de finale, et l’Angleterre en demi.

Un sacre mérité

Mais les Springboks n’ont pas volé pour autant le trophée William Webb Ellis vu leur parcours. L’Afrique du Sud a, de loin, eu le parcours le plus difficile lors de cette compétition puisqu’elle a affronté les cinq autres équipes du Top 6 mondial (Irlande, Nouvelle-Zélande, France, Angleterre et Écosse), même si elle s’est inclinée de peu en phase de poule contre l’Irlande.

De quoi laisser de gros regrets aux Français battus seulement par les futurs champions du Monde, par un seul petit point, avec un arbitrage en leur défaveur. Antonius pouvait clamer sa joie au téléphone en appelant ses amis après cette victoire historique. Et savourer la remise de la Coupe avant le feu d’artifice final.

LES PROPOS EMOUVANTS DE SIYA KOLISI

Présentation France-Afrique du Sud
Siya Kolisi le capitaine des Springboks (Photo Michael Steele – World Rugby/World Rugby via Getty Images)

Longtemps après le coup de sifflet final, à cause de la cérémonie protocolaire qui a suivi cette finale Afrique du Sud/Nouvelle-Zélande, le sélectionneur Jacques Nienaber et le capitaine sud-africains Siya Kolisi, sont venus en conférence de presse. Sans aucun triomphalisme, et avec beaucoup d’humilité, ils ont fait part de leur joie après cette 4ème Coupe du Monde conquise.

Kolisi a capté l’attention grâce à des propos forts, empreints de sincérité. « Il n’y a pas grand-chose qui va dans notre pays en ce moment et nous avons le privilège de faire ce que nous aimons, de pouvoir inspirer les gens, et pas uniquement ceux qui aiment le sport. En venant d’où je viens, je ne pouvais même pas rêver d’en être là aujourd’hui. Nous venons d’horizons différents. J’avais mes propres objectifs et ambitions. Je veux prendre soin de ma famille, je veux rendre à ma communauté ce qu’elle m’a donné. Il faut venir en Afrique du Sud pour comprendre. Quand nous sommes ensemble, rien ne peut nous arrêter, pas seulement dans le sport mais aussi dans la vie. On ne peut pas promettre de gagner tout le temps, mais de tout donner oui. »

Le capitaine des Springboks, le premier à brandir deux fois de suite le trophée William Webb Ellis, a aussi rendu un hommage vibrant au sélectionneur Jacques Nienaber, dont c’était la dernière rencontre; et à son staff. « Vous nous avez toujours traité comme des hommes, et pas de simples joueurs. Vous n’avez jamais élevé la voix et toujours fait confiance… La motivation est venue de chez nous et de nos familles. Les entraîneurs ont créé un environnement qui nous permet d’être avec nos familles, où que nous soyons, comme si nous étions chez nous. Il y a 15 à 20 enfants qui courent dans l’hôtel… C‘est l’une des plus belles choses qu’ils aient pu faire pour nous. « 

Kolisi, l’enfant issu des townships, représente bien cette Nation Arc-en-Ciel. Et l’on se réjouit d’avance de le voir évoluer prochainement dans le Top 14 puisqu’il jouera cette saison en France, au Racing 95.

A propos de JEAN-MARC DEVRED 1587 Articles
Journaliste professionnel depuis 1980, après des études de journalisme au CUEJ de Strasbourg. Carrière en presse écrite, en radio et surtout en télévision à France3 Nord-Pas-de-Calais.