RUGBY: UN APRES-MIDI PAS ORDINAIRE AU STADE BOLLAERT-DELELIS

Rugby Racing 92 La Rochelle
Une vue insolite de la tribune Trannin (photo JMD/Sports5962)

Alors que les Sang et Or ont joué la veille à Troyes, il y avait bien un match dimanche après-midi au stade Bollaert-Delelis. Mais c’était avec un ballon ovale pour une rencontre exceptionnelle: une demi-finale de Champions Cup, la Ligue des Champions pour l’Ovalie. Ce match européen avait des allures de Top 14 puisqu’il opposait deux clubs français: le Racing 92, privé de stade, et le Stade Rochelais, bien éloigné du Pas-de-Calais. On était loin de l’ambiance de la Ligue 1. Mais on ne s’est pas ennuyé durant cet après-midi pas ordinaire consacré au rugby à Lens.

Dans une chaleur digne du Sud-Ouest, le Stade Bollaert-Delelis à Lens a revécu une journée de rugby, comme dans un passé pas si lointain. Certes, on était loin des chambrées à guichets fermées de la saison de football. Si la tribune Marek-Xercès était quasiment pleine, avec essentiellement des supporters parisiens, les tribunes Delacourt et Trannin ne l’étaient qu’au tiers. La tribune Lepagnot, elle, était fermée. Seuls les journalistes et les VIP y siégeaient. Quelques supporters Sang et Or côtoyaient les rares supporters venus de la lointaine Rochelle…

Pourtant, les 15 000 spectateurs présents ont fait du bruit, créant une ambiance bon enfant au son des bandas. Une ambiance colorée, festive, mais très éloignée de celle du RC Lens.

Cependant, les spectateurs présents ont joué le jeu, en chantant les corons durant le match, festoyant ainsi avec les Lensois présents dans leur kop. Quant aux rares supporters rochelais présents, on les a quand même entendu entonner » ici, ici, c’est La Rochelle ! »

Le rugby à Lens n’a pas fait recette

Le fait de jouer à Lens un match de rugby devant 15 000 spectateurs seulement est revenu sur le tapis. En conférence de presse, le manager rochelais Ronan O’Gara a ainsi lancé d’entrée: » ll y a beaucoup d’émotion, parce que c’est une grande compétition, elle mérite plus qu’aujourd’hui. 3,4, 5000 personnes qui regardent cela, (NDLR: en fait il y en avait plus de 15 000) ce n’est pas la Champions Cup. C’est une grande déception depuis 25 ans, quand j’ai commencé le rugby, de voir cela…. Mais ce n’était pas notre décision. »

Ronan O’Gara, à droite, a regretté le manque de public (photo JMD/Sports 5962)

Gaël Fickou, malgré la forte présence des supporters franciliens, affirme aussi: » on ne va pas se mentir, c’est frustrant de voir une partie des tribunes vide. Malheureusement, je comprends les gens qui ne peuvent pas faire le déplacement, ça coûte cher, ils travaillent le lundi. Je comprends que c’est compliqué de venir à Lens quand tu vis à Paris. »

«  Je vais être honnête, pour une demie, c’était bizarre », renchérie ainsi le centre rochelais Jérémy Sinzelle. » Après, on a joué dans un stade mythique. On a la chance de jouer à Bollaert. C’est un beau stade. Mais il en contient 38 000, on joue devant 16 000 personnes et on voit que la veille il y a 50 000 personnes à l’Aviva… »

Mais Grégory Aldrit préfère positiver en affirmant « être surpris par le nombre de supporters rochelais qui se sont déplacés. On pense avoir tout vu avec eux mais ils nous surprennent de match en match. Et je n’ai aucun doute: ils seront nombreux à Marseille. »

Un match fermé mais plein de suspense

Ce match de rugby disputé à Lens n’a pas donné lieu à un grand spectacle. On a assisté à un duel âpre, un combat d’avant peu spectaculaire, sans grandes envolées, mais avec un scénario riche de suspense. Le Racing domine le début de la rencontre pour mener 10-0, grâce à un essai du centre international Virimi Vakatawa à la 26è minute, avant de se faire remonter 10-8 à la mi-temps.

Les Charentais, malgré la défaillance de leur botteur néo-zélandais Ihaia West, vont prendre l’ascendant en 2ème période pour s’imposer 20-13 grâce à deux essais; un de pénalité à la 53è. Et un dans la dernière minute du même West. Les Parisiens ont quand même bien résisté lorsqu’ils ont dû jouer à 13 contre 15 après les deux cartons jaunes donnés coup sur coup par l’arbitre à Camille Chat et Gomes Sa (52è et 53è).

Mais le Racing 92 qui partait favori dans un stade Bollaert-Delelis de Lens en mode rugby acquis à sa cause, a laissé passer sa chance. D’où l’énorme déception des joueurs et supporters franciliens après le match. Et la joie énorme, malgré la fatigue, des Rochelais qualifiés pour une 2ème finale européenne de suite.

Dans la chaleur de Bollaert

Curieusement, les joueurs ont souffert … de la chaleur, dans cette rencontre disputée pourtant au Nord de la France. «  La chaleur ? Ce n’est pas une excuse mais ça pèse », confirme le capitaine parisien Gaël Fickou. Son entraîneur Laurent Travers va dans le même sens.  » oui, il faisait très très chaud mais c’était pour les deux équipes. Tout le monde était fatigué, tout le monde avait des crampes, mais c’est la fin de saison.  » Même point de vue pour le manager rochelais, le légendaire Ronan O’Gara. « On a vu 46 joueurs en souffrance ce soir, avec cette chaleur. Ce n’était pas un très beau spectacle pour les supporters mais les joueurs ont fait d’énormes sacrifices.« 

Le capitaine rochelais Grégory Aldrit, auteur d’une performance énorme, affirmera même avec humour. » La chaleur n’a pas aidé. J’espère qu’à Marseille (pour la finale), il fera moins chaud. Mais je n’y crois pas… »

Les Charentais joueront donc une deuxième finale de Champions Cup consécutive après celle perdue l’an passée contre Toulouse. Ce sera le 28 mai à Marseille contre les Irlandais du Leinster, qui ont atomisé le Stade Toulousain tenant du titre (17-40).

Grégory Aldrit auteur d’un grand match avec La Rochelle (photo DR EPCR)

Les réactions

  • Laurent Travers, manager général du Racing 92.  » C’était un match âpre, très engagé physiquement, qui manquait de fluidité. Donc à partir de là, ça a été très difficile d’enchaîner. Mais je le répète, quand on concède autant de pénalités, c’est difficile de gagner un match. Je suis fier de l’état d’esprit de mes joueurs et de leur engagement, ils ont mis énormément de coeur.« 
  • Gaël Fickou, capitaine du Racing 92. « On est déçus car on est passé de quelque chose d’immense. C’est dur mais on se doit de se relever. Il y a des mecs qui font des métiers hyper compliqués. Nous, on fait du sport. Si on ne se relève pas, et qu’on n’a pas envie de se remettre sur le terrain, c’est qu’on a un problème. Il y a des choses plus dures dans la vie. »
  • Ronan O’Gara, entraîneur du Stade Rochelais.  » C’est énorme, c’est une grande fierté pour le club, pour les supporters. On aimerait tous gagner des choses, mais il y a des étapes pour le faire. On est arrivés deux fois à sortir du dernier carré, c’est top pour le Stade Rochelais, c’est un super club avec des vrais supporters. »
Laurent Travers en pleine discussion avec Bernard Herrero (photo JMD/Sports 5962)
  • Jérémy Sinzelle, centre du Stade Rochelais.  » C’était une demie un peu hachée, où on n’a pas su mettre notre jeu en place. Mais on a su faire face à 23, pas à 15… Quand on est en fin de carrière comme moi, le fait de rejouer une finale est positif. C’est bien d’aller en finale. Mais maintenant, il faut les gagner les finales… »
  • Grégory Aldrit, capitaine du Stade Rochelais. « Cette deuxième qualification d’affilée en finale de Champions Cup représente énormément de bonheur, de joie. Le plus grave serait de la banaliser, mais non, c’est énorme. Le groupe a passé un cap mais bon, on a découvert ce que c’était et on veut arrêter de fêter des demi-finales, on veut quelque chose de plus. La finale sera très dure, très relevée, on sait où on met les pieds car on a déjà joué le Leinster. »
A propos de JEAN-MARC DEVRED 1611 Articles
Journaliste professionnel depuis 1980, après des études de journalisme au CUEJ de Strasbourg. Carrière en presse écrite, en radio et surtout en télévision à France3 Nord-Pas-de-Calais.