Dimitri Jozwicki, athlète de l’US Tourcoing, est un sportif de haut-niveau en handisport. Il souffre en effet depuis son enfance d’infirmité motrice cérébrale. Ce qui ne l’empêche pas de réussir des performances remarquables sur le sprint. Mais après les Jeux paralympiques de Tokyo, le sprinter d’origine lorraine est passé tout près de la mort à cause d’une occlusion intestinale. Aujourd’hui, Dimitri Jozwicki, qui vit depuis trois ans à Lille, a su parfaitement rebondir et envisage maintenant les Jeux Paralympiques de Paris avec une véritable sérénité.
Dimitri Jozwicki était l’un des intervenants lors du salon Sport UnlimiTech dont l’ancien rugbyman Frédéric Michalak est à l’origine. Il s’est tenu à la mi-septembre à Lille Grand Palais. Ce salon professionnel, destiné aux sportifs de haut-niveau, a notamment accueilli la visite de la Ministre des Sports Amélie Oudéa-Castera. Parmi les animations, « le vestiaire ». Il s’agit de conférences situées dans un vestiaire reconstitué en décor pour une trentaine de participants. Comme l’ancien marcheur Yohann Diniz, le sprinter handisport du Lille Métropole Athlétisme (LMA), Dimitri Jozwicki, a ainsi animé une conférence, sur le thème « guérir et rebondir ».
Son intervention a été à la fois informative et émouvante. Après s’être présenté brièvement au « vestiaire », Dimitri Jozwicki est entré directement dans le vif du sujet. Il a raconté avec simplicité la terrible expérience connue deux semaines après les Jeux Paralympiques de Tokyo, où il a pris la 4ème place du 100m.
Une occlusion intestinale gravissime
A peine rentré du Japon, il ressent des douleurs à l’abdomen. Il se rend aux urgences du CHR de Lille. Sans penser à ce qu’il va se passer. Une analyse de sang fait apparaître une occlusion intestinale très avancée. Il doit être opéré tout de suite. Une opération très lourde qui durera six heures. Son diagnostic vital est d’ailleurs engagé.
Heureusement, il en réchappe. Mais c’est le début d’une longue convalescence durant laquelle le mental est fortement touché. Dimitri voit tout son avenir, tourné vers Paris 2024, remis en question. Après l’hospitalisation durant laquelle il broie du noir, mais qui lui permet de relativiser ( » je me suis aperçu que perdre un 100m finalement, ce n’est pas grave. Car j’ai bien failli perdre la vie... ») survient une longue convalescence. Durant celle-ci, il passe par de nombreuses étapes. D’abord être capable de remarcher et de faire des efforts apparemment anodins. » J’envisageais avant la maladie de grimper l’Everest. Quand je voyais combien c’était dur de marcher, je me suis dit que cela allait être compliqué.«
» Ce qui est important, c’est de se fixer des micro-objectifs« , explique ainsi cet ergothérapeute de métier. Durant les premiers jours, cela voulait dire pouvoir boire, manger. Ensuite être capable de prendre sa douche et assumer ses besoins seuls. Puis sorti de l’hôpital, réapprendre à marcher seul. Et ainsi de suite jusqu’à retrouver son autonomie.
Une grande saison après la convalescence
Mais pour revenir sur les stades, cela semblait impossible. Là aussi, il lui faudra passer par différents échelons. La course lente, sans objectif de compétition. Simplement pour retrouver une activité physique. Et peu à peu, le miracle se produit. Il retrouve dans le courant de l’année 2022 toutes ses facultés. Au point de battre son record personnel sur 100m lors d’un meeting en Suisse en 11secondes 21. Puis de battre le record de France du 200m dans sa catégorie (23″63). Bref, Dimitri réalise quelques mois après sa maladie sa meilleure saison.
Maintenant, Dimitri Jozwicki peut de nouveau penser à Paris 2024. » Je vise à nouveau à nouveau une médaille, puisque j’ai terminé 4ème à Tokyo. » Pour cela, le Lillois d’adoption bénéficie de l’encadrement sportif du LMA au même titre que Wilfried Happio, Pierre-Ambroise Bosse et Cyrena Samba-Mayela. » D’ailleurs à Tourcoing, je m’entraîne avec un groupe d’athlètes valides. C’est une forme de reconnaissance pour le handisport. »
» Etre athlète de haut-niveau, c’est une vie de sacrifices «
Dimitri Jozwicki
Le Nancéien vit ainsi depuis trois ans à Lille. » C’est un club accueillant qui m’accompagne au mieux dans mon projet paralympique. Avec de vrais valeurs humaines. Au-delà de l’aspect financier, c’est important d’avoir un soutien moral et un accompagnement quand on est sur la piste. »
Un ambassadeur de la métropole lilloise
Devenu en 2019 ambassadeur de la Métropole européenne de Lille, il reçoit un financement afin de l’aider à s’équiper et à mener son double projet sportif et professionnel jusqu’aux Jeux olympiques à Paris en 2024. Il est actuellement titulaire d’une Convention d’Insertion Professionnel (CIP) avec Pôle Emploi où il exerce le métier de chargé des conditions de travail. Et il vient de conclure un partenariat avec KIprun, la marque spécialisée dans l’athlétisme de Décathlon.
Le sprinter handisport bénéficie ainsi d’un aménagement d’horaires. 30%, soit deux jours de travail par semaine. Le reste du temps, Dimitri Jozwicki s’entraîne, et intervient aussi pour ses partenaires, mais aussi dans les écoles, comme il l’a fait au Sport UnlimiTech Tour à Lille. A chaque fois, il parle de son expérience, et de la façon avec laquelle il a surmonté son handicap.
» Etre athlète de haut-niveau, c’est une vie de sacrifices« , confie-t’il. » Car à 25 ans, généralement, on fait la fête avec les copains. Ce n’est pas mon cas. Mais c’est la vie que j’ai choisi. Quand j’arrive en compétition avec le maillot de l’équipe de France, tout ces sacrifices s’effacent très vite. »
Après avoir frôlé la mort de près, Dimitri Jozwicki a fait preuve, c’est le mot à la mode, de résilience. Depuis sa maladie, il retrouve le haut-niveau avec une sérénité qu’il ne connaissait pas avant. « Cela me permet notamment de courir plus relâché, ce qui est important pour un sprinter. »
L’année prochaine, l’objectif principal sera les championnats du Monde d’athlétisme handisport, à Charléty. Auparavant, il fera une saison en salle complète en salle. Ce qui l’amènera ainsi à courir au stade couvert de Liévin.
Ce sera l’occasion pour le public nordiste de découvrir un vrai champion, plein de sensibilité et de d’humilité.