L’équipe de France de rugby bat péniblement celle d’Uruguay lors de la 2ème journée de la Coupe du Monde (27-12). Les Sud-Américains ont souvent inquiété une équipe de France B qui n’est pas parvenu à imposer son jeu. Malgré cette prestation décevante des Bleus, le public du stade Pierre-Mauroy a donné de la voie, sauf à la fin. Récit d’une soirée frustrante… pour tout le monde.
Une vague bleue a déferlé en fin d’après-midi sur Villeneuve-d’Ascq. Malgré la date peu commode, un jeudi soir, le stade Pierre-Mauroy faisait le plein pour ce duel « exotique » entre la France, 3è nation mondiale, et l’Uruguay, n°17. Un match à priori déséquilibré sur le papier. Mais comme Fabien Galthié faisait jouer les « finisseurs », le XV de France était privé de tous ses cadres laissés au repos après le choc contre les All Blacks. Soleil et chaleur étaient aussi au rendez-vous pour ce 2è match des coqs, face aux perdrix (los teros) d’Uruguay.
Après la pénurie de Marseille, des pompes à bière étaient installées tout autour du stade. Sinon que le préfet du Nord (encore lui), a fermé les buvettes au dernier moment. Un arrêté tardif exigeait la fermeture dès 20h des « débits de boisson et stands de vente à emporter de boissons et d’aliments à consommation immédiate dans un rayon de 500m autour du stade Pierre-Mauroy ». Cela soi-disant pour éviter « un afflux massif de personnes stationnant dans les débits de boissons situés sur le parvis du stade rendant ainsi difficile et long son accès .» Bonjour la convivialité…
Une Marseillaise sans enfants
Un invité non prévu est arrivé également à Villeneuve-d’Ascq voir ce France-Uruguay de rugby. Emmanuel Macron était en effet là avec trois de ses ministres et le chef d’Etat uruguayen, Luis Alberto Lacalle Pou. Mais le Président de la République s’est installé discrètement dans la tribune officielle, ce qui lui a évité d’être hué comme au Stade de France.
La Marseillaise en revanche est chantée à tue-tête par un public enflammé. Une version musicale chantée et enregistrée remplaçait les chorales d’enfants, après le flop des premiers matches sur les hymnes nationaux.
Le décor est ainsi planté quand l’arbitre M.O’Keeffe lance la rencontre. L’ambiance n’a pas le temps de redescendre puisque Melvyn Jaminet ouvre le score dès la 4è minute grâce à un but de pénalité. Mais les Teros répliquent dans la foulée par un essai en coin de Nicolas Freitas. A la surprise générale, l’Uruguay mène 5-3 à la 6è minute !
La « plaisanterie » ne va pas durer longtemps. Les avants bleus font le siège de la mêlée adverse. Et le demi d’ouverture Antoine Hastoy plonge pour un essai victorieux transformé par Melvyn Jaminet. La France reprend l’avantage 10-5 à la 13è minute. Puis 13-5 après une nouvelle pénalité du même Jaminet, aussi efficace que son équipier toulousain Thomas Ramos (16è). Ce début en fanfare déclenche une première « ola ». Chaque attaque des Bleus provoque une clameur dans un stade qui vibre à fond derrière son équipe.
Un carton jaune mal venu
Cette ardeur se calme malheureusement quand le 2è ligne Romain Taofifenua prend un carton jaune pour un placage haut (27è). Les Français vont devoir jouer à 14 face à des Sud-Américains coriaces. Et ceux-ci profitent de cette supériorité numérique pour marquer un 2è essai par Felipe Etcheverry. Mais celui-ci est annulé par la VAR pour un écran d’Inciarte sur Hastoy ! Ouf… Finalement, le score n’a pas bougé quand Taofifenua fait son retour sur le terrain au bout de 10 minutes. Mais les équipiers d’Anthony Jelonch ont eu chaud.
France et Uruguay regagnent le vestiaire sur cet avantage de 13-5 pour des Français pas malheureux lors de cette première mi-temps de rugby. Comme face aux All Blacks après 40 minutes de jeu. «On était face à une équipe qui avait énormément d’envie et qui commençait sa compétition », expliquera ainsi le 2è ligne Cameron Woki. « Je pense qu’on les a respectés, mais on n’a pas su mettre notre jeu en place, en mêlée ou dans le jeu courant. On savait qu’on dominait, mais on n’était pas patients. Il faut essayer d’y remédier et de travailler dessus être plus patients la prochaine fois. »
Los Teros malmènent à nouveau les Coqs dès l’entame de la seconde période. Et cette fois, on entend moins le public. D’autant que Melvyn Jaminet rate une pénalité à la 45è minute. Et que l’essai en contre de Gabin Villière est refusé par la VAR pour en-avant.
Un match complètement décousu
C’est le moment que Fabien Galthié choisit pour faire entrer des « finisseurs ». Il procède ainsi à cinq changements d’avants. Malgré ce coaching, les entrants sont pris à froid par un essai de Baltazar Amaya transformé par Etcheverry. L’Uruguay revient à un point: 13-12 (54è) !
Le match devient fou puisque le talonneur Peato Mauvaka marque un essai dans la foulée, en contrant un dégagement de Etcheverry, et transformé par Jaminet. La France reprend de l’avance (20-12, 56è), après un passage à vide. Le public lillois retrouve enfin de la voix et lance une nouvelle Marseillaise.
Les Français ont bien besoin de ce soutien car sur le terrain, ils souffrent toujours autant face à des Uruguayens valeureux. Ils sont aussi moins disciplinés que face à la Nouvelle-Zélande et concèdent de nombreuses pénalités (15). Et ils pêchent en défense avec des placages manqués.
Heureusement, le jeune Louis Bielle-Barret va libérer les siens en marquant un vrai essai d’ailier à 8 minutes de la fin. Jaminet transforme en coin et donne enfin un avantage confortable au XV de France (27-12, 73è).
L’écart aurait pu se creuser encore plus si la VAR n’avait pas encore une fois annulé un essai de Sekou Macalou marqué après une interception. Cette décision contestable prive le XV de France d’un 4è essai. Et donc du point de bonus offensif. Plus rien ne se passera, et les Bleus essuient même quelques sifflets à l’issue d’une rencontre frustrante, aussi bien pour les joueurs que pour le public.
Le minimum syndical
La France s’impose finalement sur ce score minimum de 27-12 face à une équipe d’Uruguay vaillante et qui a joué sans complexe face à une puissance mondiale du rugby. Fabien Galthié reconnaît: « On a été gênés par l’équipe d’Uruguay qui a bien réalisé son plan, mais à la fin on a gagné. On peut être satisfait. S’il y a de la frustration, c’est plus chez les joueurs. On a envie qu’ils s’amusent, qu’ils soient heureux. Ils sont sans doute frustrés, on n’a pas eu le temps de parler, mais respectons l’adversaire. »
Mais contre l’Italie, le XV national aura besoin du retour de ses cadres après ce succès laborieux. Les « finisseurs » auront sans doute une nouvelle chance contre la Namibie avant. Mais il n’y aura pas de « coiffeurs ».
Les réactions
Raphaël Ibanez, manager de l’équipe de France. « Ce qui est bien dans cette compétition, de jouer en France, c’est tout simplement le public et l’ambiance incroyable, c’est un énorme coup de pouce et ça donne beaucoup d’énergie aux joueurs, donc merci aux supporters. »
Sipili Falatea, pilier. « Il y avait de notre part un peu trop d’énergie et trop d’envie. Et dès que nous avons voulu surjouer, ou jouer seul, cela a eu des incidences sur le collectif. »
Louis Bielle-Biarrey, ailier. « Nous avons eu du mal à mettre notre jeu en place et à mettre du rythme. Personnellement, j’aurais bien aimé avoir plus de ballons. Mais le match était compliqué pour tout le monde. Mais on s’est accroché et on obtient une belle victoire d’équipe face à l’Uruguay et on continue maintenant. »
Dorian Aldegheri, pilier. « Cela a été un match frustrant. Mais nous étions devant une très belle équipe d’Uruguay qui a battu les Fidji il y a 4 ans. Ils avaient beaucoup d’envie. Et on l’a vu sur le terrain. On aura le temps cette semaine d’analyser le match et de passer à autre chose. »
Thibaud Flament, 2è ligne. « Notre manque d’engagement explique certainement les placages loupés et les pénalités reçues. On avait du mal à enchaîner. C’était un peu le b… Malgré tout, on est à deux matches gagnés sur deux. Cela reste positif. On a ressenti beaucoup d’ambiance. L’atmosphère était électrique. C’était génial. Le public nous a bien soutenu même si nous n’avons pas produit un grand match.«